Aller au contenu

Menu principal:


Protestations contre l'insatauration d'une taxe pour aller en justice

Archives > 2012 > Espace presse

Protestations contre l'instauration d'une taxe pour aller en justice

LEMONDE.FR | 29.09.11 |

Ils veulent que la justice reste gratuite pour tous. Des syndicats de la magistrature, d'avocats et de salariés ont dénoncé, mercredi 28 septembre, sur les marches du Palais de justice de Paris, l'instauration d'une taxe de 35 euros, que le justiciable non-bénéficiaire de l'aide juridictionnelle devra dorénavant payer pour aller devant les tribunaux civils, administratifs et commerciaux. Cette disposition figure dans la loi de finances rectificative adoptée le 29 juillet.

A partir du samedi 1 octobre, le salarié qui souhaite aller aux prud'hommes, le locataire en litige avec son propriétaire ou le consommateur lésé seront dans l'obligation de payer un timbre fiscal d'une valeur de 35 euros s'ils souhaitent que leur cas soit étudié par un juge.

"INÉGALITAIRE ET PAR CONSÉQUENT INJUSTE"

Magistrats, avocats et salariés dénoncent à l'unisson une mesure
"inégalitaire et par conséquent injuste". Une question de principe démocratique. "L'instauration de cette taxe n'a pas d'autre but que de réduire l'accès des citoyens aux juges et à la justice", dénonce Pascale Taelman, présidente du syndicat des avocats de France.

Faux, rétorque Bruno Badré, porte-parole du ministère de la justice. L'instauration de ce
"droit de timbre" ne sert qu'à financer la réforme de la garde à vue, "au nom de la solidarité entre les justiciables". "Avant la réforme, l'aide juridictionnelle coûtait 15 millions d'euros par an, après son application 100 millions d'euros annuels. Il a donc fallu trouver 85 millions d'euros", explique M. Badré.

Ces 85 millions d'euros n'iront pas dans les caisses de l'Etat, mais dans celles des avocats, insite Bruno Badré. Comme le texte de loi le précise, les fonds recueillis seront
"intégralement affectés au paiement des avocats effectuant des missions d’aide juridique par l’intermédiaire des caisses de règlements pécuniaires des avocats (CARPA)".

Ces considérations budgétaires laissent de marbre Pascale Taelman :
"le budget de l'aide juridictionnelle est mineur par rapport à celui de la construction des prisons par exemple", argue-t-elle. Pour elle, l'argent peut se trouver ailleurs : "On ne taxe pas les actes juridiques, on ne taxe pas les entreprises, on ne taxe pas ceux pour qui la facture serait indolore."

Selon les représentants syndicaux, ce sont les justiciables les plus fragiles qui seront les premières victimes de cette nouvelle taxe.
"35 euros, c'est le smic quotidien d'une personne employée à mi-temps", souligne Dominique Duclos de l'UNSA. "La taxe sera aux frais du demandeur, estime Meissa Allal de la CGT. Or, dans 95 % des cas, ce sont les employés qui saisissent les prud'hommes. Le patronat en sera donc exempté."

Là encore, Bruno Badré dément :
"Les bénéficiaires de l'aide juridictionnelle ne paieront pas ce droit de timbre, tout comme les personnes surendettées ou les entreprises en difficulté", rappelle-t-il. Soit, selon les chiffres du ministère, 750 000 procédures, qui seront de facto exonérées de cette taxe sur les 3,2 millions engagées chaque année.

Il faut croire que l'Etat fait partie des plus précaires. L'article 20 du texte de loi de finances rectificative, dont le décret d'application
"devrait être publié dans les prochains jours", selon Bruno Badré, prévoit que l'Etat n'aura pas à s'acquitter de cette taxe. Au ministère de la justice, on affirme ne pas savoir pourquoi.

UNE ATTAQUE DE PLUS CONTRE LA JUSTICE

Magistrats et avocats sont excédés par une réforme de plus, votée en plein cœur de l'été, sans aucune concertation. Une mesure qu'ils interprètent comme une attaque frontale contre la justice ordinaire.
"La justice civile, celle qui traite des difficultés quotidiennes des citoyens, passe par pertes et profits. C'est une façon de démanteler le service public de la justice, lorsqu'il ne sert par les intêrets répressifs du pouvoir", condamne Pascal Henriot, substitut général de Paris et membre du Syndicat de la magistrature (SM, gauche).

L'intersyndicale demande donc le retrait pur et simple de cette taxe. Et espère que le Sénat, passé à gauche, l'invalidera lors des prochains débats sur le budget. A défaut, il se murmure, parmi les avocats, que le dossier sera porté devant les juridictions européennes. Avec à la clé une possible invalidation de cette taxe, selon Pascale Taelman, puisque
"l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme prévoit un procès équitable et sans entrave. Or, une telle taxe est une entrave à la justice".

Thomas Monnerais


Signer la pétition de la CGT:
Exigeons le retrait de la taxe de 35 euros



Retourner au contenu | Retourner au menu