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Au Ritz, vrais-faux licenciements pour travaux

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Au Ritz, vrais-faux licenciements
pour travaux

Source : l'Humanité - le 14 juin 2012

Le palace doit fermer deux ans pour rénovation. Pour limiter les coûts, il pousse les 470 salariés vers la sortie.

Concurrence, oblige, le Ritz, palace de 160 chambres classé cinq étoiles, situé place Vendôme à Paris, ferme ses portes cet été pour une rénovation totale. Les travaux doivent durer vingt-sept mois et occuper 600 salariés sous la houlette de Bouygues Construction, pour la modique somme de 140 millions d’euros. Mais derrière ces créations d’emplois se cachent presque autant de destructions : pour réduire le coût de l’opération, le palace pousse vers la sortie la quasi-totalité de son personnel, en jurant qu’elle les réembauchera à la réouverture.

En septembre, la direction de l’hôtel, propriété du milliardaire égyptien Mohammed Al Fayed, a annoncé un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) assorti d’un plan de départs volontaires, pour 470 de ses 500 employés. Après l’avis favorable rendu en mars par le comité d’entreprise (à majorité Unsa), elle a envoyé début avril un courrier à chaque salarié lui donnant le choix entre la peste et le choléra : soit une suspension du contrat de travail sans salaire pendant vingt-sept mois, soit un départ volontaire de l’entreprise, avec un gros chèque et une priorité de réembauche à l’issue des travaux. À défaut, le salarié serait licencié pour motif économique.

«Une majorité de salariés a choisi le départ volontaire, mais, pour nous, il est immoral qu’un hôtel détenu par un multimilliardaire mette 470 personnes sur le carreau, à la charge de Pôle emploi », dénonce Didier Del Rey, de la CGT commerce de Paris, qui rappelle que jusqu’à présent la plupart des palaces ont maintenu les contrats de travail et les salaires lors des rénovations. Claude Lévy, du même syndicat, met en garde : « La priorité de réembauche n’est pas contraignante. Si le Ritz ne la respecte pas, le salarié ira aux prud’hommes mais obtiendra seulement deux mois de salaire de dommages et intérêts. Et il sera arrivé en fin de droits à Pôle emploi. »

Malgré sa faible implantation au Ritz, la CGT vient de saisir la justice pour demander l’annulation du PSE pour fraude au droit du licenciement économique, en arguant que le Ritz ne supprime pas réellement d’emplois mais utilise la procédure de licenciement collectif pour ne pas avoir à payer les salaires pendant vingt-sept mois, une économie évaluée à 54 millions d’euros. « Dans l’affaire Viveo, la Cour de cassation a barré la route à l’annulation des plans sociaux pour défaut de motif économique, mais a laissé la porte ouverte en cas de fraude. C’est sur ce terrain que nous nous sommes placés », explique l’avocate de la CGT Marie-Laure Dufresne-Castets. Le syndicat veut éviter que le Ritz ne crée un précédent, alors que les rénovations du Crillon, du Lutetia, du Concorde Lafayette et du Plaza Athénée sont programmées ces prochains mois. Audience le 11 septembre au tribunal de grande instance de Paris.

Fanny Doumayrou

Lire aussi l'entretien de Marie-Laure Dufresne-Castets :
« On fabrique les volontaires au départ »



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