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Les grands magasins du Printemps sur le point d'être rachetés par le Qatar

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Les grands magasins du Printemps sur le point d'être rachetés par le Qatar


Source : Le Monde_21.02.2013

C'est la fin du suspense pour l'un des emblèmes des grands magasins à la française. Mercredi 20 février, le fonds Rreef, filiale de gestion immobilière de la Deutsche Bank, a annoncé être entré en négociations exclusives avec le groupe Borletti associé à des "investisseurs qataris" – à l'identité non révélée – pour le rachat de sa part de 70 % dans le Printemps. La société gérée par l'homme d'affaires italien Maurizio Borletti possède déjà 30 % de l'enseigne au célèbre navire amiral du boulevard Haussmann, à Paris.

Le communiqué, sibyllin, met hors jeu les différents prétendants qui ont tourné autour du dossier ces derniers mois. Parmi eux, le groupe immobilier chinois Wanda, mais surtout les Galeries Lafayette. On prêtait au principal concurrent du Printemps, qui doit recevoir d'ici à l'automne le produit de la cession de ses parts dans Monoprix, l'intention de mettre 1,6 milliard d'euros sur la table.

"Les Galeries avaient déposé une offre", assure-t-on dans l'entourage du groupe. Qui enrage de s'être vu souffler sa proie... pour la seconde fois en sept ans. Lors de la cession par PPR, en 2006, le groupe de Philippe Houzé avait déjà examiné le dossier. A l'époque, Rreef et Borletti avaient acquis l'enseigne pour 1,075 milliard d'euros. Cette fois, le prix de la transaction est estimé entre 1,6 et 2 milliards. Une belle plus value pour Rreef, et un moyen pour M. Borletti – qui, selon la presse, ferait en fait entrer le Qatar au capital de son groupe – de garder un œil sur son bébé.

STRATÉGIE DE MONTÉE EN GAMME

En mettant la main sur l'intégralité du Printemps, le groupe italien et le Qatar prennent le contrôle d'une entreprise florissante. En six ans, son chiffre d'affaires a bondi de 30 % pour atteindre 1,45 milliard d'euros en 2011 et son résultat opérationnel a doublé.

Le secret de cette réussite ? Une stratégie de montée en gamme impulsée par M. Borletti, grâce à des investissements conséquents – 350 millions d'euros, dont 150 millions à Haussmann – qui ont fait de son magasin parisien un symbole du luxe à la française.

"Le Printemps a cessé de vendre des livres, des CD et des jouets pour enfants. Il a renforcé son offre d'accessoires (maroquinerie, écharpes, ganterie) : le panier moyen dans ce rayon a été multiplié par dix en cinq ans !", indique Yves Marin, consultant chez Kurt Salmon.

Autre évolution gagnante : remplacer les immenses rayons en propre par des "corners", ces espaces loués à des marques huppées (par exemple Vuitton...) qui amènent leur marchandise et leurs vendeuses en échange de royalties
"de l'ordre de 30 % à 40 % du chiffre d'affaires", selon M. Marin. Enfin, "le groupe a misé sur la clientèle internationale, passée de 10 % des ventes en 2006 à 35 % aujourd'hui", complète l'expert.

Une petite révolution menée en draguant systématiquement les touristes, notamment chinois et russes, dans les grands hôtels parisiens. Mais aussi en embauchant des "guest managers" et "personal shoppers" multilingues.
"En 2006, Le Printemps était une belle endormie. M. Borletti l'a réveillé", résume un spécialiste du secteur.

MONTRER PATTE BLANCHE

Une stratégie que devraient garder les nouveaux propriétaires.
"Nous allons poursuivre le repositionnement du groupe en continuant à investir", indique-t-on dans leur entourage. Trois nouveaux magasins doivent ouvrir dans les prochaines années, en plus des 16 implantations actuelles dans l'Hexagone.

Reste à savoir si le succès du magasin parisien (qui représente désormais la moitié du chiffre d'affaires) est duplicable en province, à une clientèle plus locale.
"Il faudra soit faire monter en gamme les magasins, soit en céder", estime M. Marin.

Du côté des quelque 4 000 salariés du groupe, on se dit pour l'heure soulagé que le voisin du boulevard Haussmann, deux fois plus gros en chiffre d'affaires, n'ait pas emporté la mise.
"Un rachat par les Galeries aurait été une catastrophe sociale pour la centrale d'achat et les fonctions support", estime Françoise Laconi, déléguée CFE-CGC. Les Qataris, eux, s'efforcent de montrer patte blanche. "Il s'agit d'un actionnaire de long terme, avec des moyens, qui évite une restructuration", assure-t-on. M. Borletti a réaffirmé son souhait de rester au capital du Printemps.

Audrey Tonnelier



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