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La Fnac priée de s'assumer, seule, au pire moment

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La Fnac priée de s'assumer, seule,
au pire moment


LE MONDE | 10.10.2012
Par Bertrand Bissuel et Nicole Vulser


Il n'y a pas eu de surprise : mardi 9 octobre, le conseil d'administration de PPR a décidé, à l'unanimité, de se séparer de la Fnac. C'est la solution d'un "spin off", une scission puis une mise en Bourse de cette filiale, qui l'a emporté – conformément aux scénarios qui avaient "fuité" dans la presse deux jours auparavant.

L'opération permettra à PPR – en principe fin décembre – de ne plus intégrer dans ses comptes les résultats de la Fnac, qui se dégradent depuis plusieurs trimestres, ce qui pèse sur le cours de Bourse de la maison-mère.

Chaque actionnaire de PPR recevra automatiquement, pour chacun de ses titres, une action de la Fnac, quand celle-ci sera cotée en Bourse. Les modalités financières du montage, qui devrait prendre au moins neuf mois, n'ont pas toutes été dévoilées.

Présenté, mardi, aux comités centraux d'entreprises (CCE) des diverses sociétés composant la Fnac, le schéma retenu s'intègre dans un mouvement stratégique plus large qui vise non seulement à du périmètre de PPR le "pôle distribution", mais aussi à vendre Redcats, qui chapeaute notamment La Redoute – opération annoncée depuis 2009.

Fondé par François Pinault, PPR a abandonné, en 2003, son métier d'origine, le bois, puis a cédé, au fil des années Le Printemps, Conforama, CFAO... Aujourd'hui, son fils, François-Henri Pinault, PDG depuis 2005, rêve de se délester des branches vacillantes – les actifs dans la distribution – et rendre le conglomérat plus rentable et plus lisible aux yeux des investisseurs, c'est-à-dire circonscrit au luxe (autour de Gucci) et aux vêtements et accessoires de sport et de plein air (autour de Puma).

Si la Bourse applaudit des deux mains l'annonce faite mardi (le cours de PPR augmentait de 1,75 %, à l'ouverture mercredi matin), les analystes sont très partagés. Un banquier estime que PPR aurait dû accepter une offre de reprise de la Fnac qui lui avait été faite en 2006. Plusieurs fonds avaient alors été contactés.
"Il y a trois ans, le processus de mise en Bourse de la Fnac était encore crédible, dit-il. Aujourd'hui, c'est bien plus difficile, il faudra injecter beaucoup d'argent, sinon il y a un risque de dépôt de bilan."

CHIFFRE D'AFFAIRES EN BAISSE

Analyste chez Aurel BGC, David Da Maia ne croit pas à une introduction en Bourse dès la fin du premier semestre 2013. Dans le contexte actuel, elle ferait ressortir, explique-t-il, une faible valorisation,
"autour de 500 millions d'euros", contre 2 milliards il y a deux ans, d'après d'autres observateurs. M. Da Maia penche plutôt pour une sortie de la Fnac "fin 2013, voire début 2014".

Le sociologue Vincent Chabault, auteur de
La Fnac, entre commerce et culture (PUF, 2010), estime qu'en 1994, François Pinault a repris la Fnac comme une "danseuse" pour légitimer "sa trajectoire de nouveau riche", mais "là, il s'en sépare, faute d'acquéreur". Autrement dit, la scission signe un aveu d'échec.
La Fnac est invitée à voler de ses propres ailes au moment où son avenir est très incertain. Chiffre d'affaires en baisse, bénéfices qui dégringolent... La crise dans la zone euro explique, en partie, ces piètres performances. Mais "l'agitateur culturel" souffre surtout des chambardements dans le monde de la distribution spécialisée.

Les marchés sur lesquels il excellait (disques, DVD, etc.)
"se dérobent sous ses pieds", résume Delphine Mathez, du cabinet Roland Berger. La montée en puissance du e-commerce – l'américain Amazon en tête – lui cause énormément de tort, tout comme la dématérialisation de certains produits (, musique, film).

DES MESURES DE RELANCE COMMERCIALE

Tous les distributeurs de biens culturels et électrodomestiques vivent des moments difficiles, souligne , du cabinet Kurt Salmon. Borders, la chaîne de magasins de livres et de disques aux Etats-Unis, a dû mettre la clé sous la porte en 2011. Tower Records, un autre spécialiste de la vente de disques outre-Atlantique, a fermé toutes ses boutiques.

En France, Virgin donne l'impression de vouloir se retirer graduellement du marché : au premier semestre, l'enseigne a annoncé la fermeture de deux magasins et la suppression de 80 emplois...
"Nous sommes dans une phase d'épuration des marchés", commente M. Marin.

La Fnac tente de s'. Durant l'été 2011, elle a pris des mesures de relance commerciale : développement de magasins dans les gares et les aéroports ; ouverture dans les villes moyennes de points de vente sous la forme de franchises ; création de rayons pour les enfants, commercialisation de nouvelles familles de produits positionnées sur le haut de gamme (aspirateurs, machines à café...). En début d'année, la direction a également présenté un plan d'économies qui prévoit notamment des réductions d'effectifs (500 postes en moins).

Mais la réorientation stratégique de l'enseigne ne convainc pas tout le monde. Son programme de relance part
"dans un trop grand nombre de directions", juge un bon connaisseur du secteur, sous le sceau de l'anonymat.

Pour autant,
"la Fnac ne va pas disparaître", tempère Mme Mathez. Le groupe dispose de nombreux atouts : des implantations en centre-ville de très grande qualité, un fichier d'adhérents très étoffé, un site Internet qui enregistre de bons scores de fréquentation, énumère M. Marin. Il faudra "faire bouger les lignes", complète Mme Mathez. Par exemple en réduisant l'espace occupé par les magasins et en sous-louant les mètres carrés libérés ou encore en développant des "corners" avec des marques renommées.

Vers une liquidation de Surcouf, faute de repreneurs
Aucun candidat ne s'est manifesté pour la reprise du groupe de distribution high-tech Surcouf, en redressement judiciaire depuis fin février. Le mandataire judiciaire devait demander, mercredi 10 octobre, la mise en liquidation de l'entreprise, a indiqué, mardi, un représentant du comité central d'entreprise (CCE).
Le groupe Surcouf - qui a été dans le giron de PPR entre 2000 et 2009 - était à vendre depuis juin, après l'échec d'un projet de cession de trois de ses magasins. "On craint que quelqu'un rachète les actifs de l'enseigne après la liquidation pour pouvoir continuer Surcouf sans les salariés", a déclaré le représentant du CCE. La société, dont le siège est à Lille, emploie 390 personnes. - (AFP.)

Les produits techniques, plus de la moitié des ventes
Réseau
A la fin août, la Fnac avait 163 magasins, dont 88 en France et 75 à l'étranger (Belgique, Brésil, Espagne, Italie, Maroc, Portugal, Suisse). Elle emploie plus de 18 000 personnes dont 12 000 dans l'Hexagone.
Activité
s En 2011, son chiffre d'affaires était de 4,165 milliards d'euros, en baisse de 3,2 % ; son résultat opérationnel courant a dégringolé de 46,5 %. Les produits techniques (ordinateurs, appareils photos...) représentent 54 % des ventes; viennent ensuite les CD, DVD et jeux vidéo (22 %) puis les livres et la papeterie (19 %). D'après la direction, le site Internet du groupe, www.fnac.com, reçoit en moyenne 750 000 visiteurs uniques par jour.



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